
Ours – Diego Vecchio
Il nous a tenu compagnie, il nous a aidés à affronter le dur passage entre la réalité et l’inconnu de la nuit dans ce lit, qui n’est « pas seulement une surface faite pour dormir ou rêver, c’est aussi la porte d’entrée vers un monde visqueux et obscur, comme un boyau« . L’ours, autant peluche que fantasme.
Estrella Gutiérrez n’arrive plus à faire face aux insomnies de son fils Vladimir. En bonne mère, elle a tout fait : histoires, verres d’eau, lumière. Re-histoires, re-verres d’eau, mais rien n’y fait : depuis que Vladimir a perdu son ours en peluche, il ne dort plus. En désespoir de cause, elle entre dans un magasin de jouets où elle se voit proposer l’ours Doux Dodo, concept révolutionnaire et chinois, 95% de réussite auprès des petits insomniaques. Mais voilà, le magasin est en rupture de stock, plus de Doux Dodo. Déterminée, Estrella Gutiérrez en vole un parmi les jouets défectueux.
Le concept est simple : Otto, l’ours en question, est lui-même insomniaque. L’enfant doit donc s’occuper de lui jusqu’à ce qu’il s’endorme ; jusqu’à ce qu’ils s’endorment tous deux. Mais Otto est vraiment tout à fait particulier, et c’est lui qui va se mettre à raconter des histoires à Vladimir, des histoires de plus en plus terrifiantes.
Terrifiantes ? Diego Vecchio s’inspire des contes les plus célèbres de notre enfance qui ne manquent pas de cruauté. La Belle au Bois dormant est ainsi revisité version ours et grenouilles, qui compte aussi ses fées et ses sorcières. Puis viennent les ogres qui traquent et mangent les enfants à toutes les sauces. La modernité se glisse dans ce conte avec des personnages de dessins animés, autres héros des enfants. Des héros dont on ne sait pas tout, voire même rien de la vie mouvementée, en dehors de la télé. On en apprend de belles sur les manières de Casimir, oui Casimir, « ce saurien , avec ce sourire benêt, ces yeux globuleux, cette énorme bouche édentée, cette bedaine orange plus grosse que ses pattes, sans oublier cette collerette ridicule qui avait tant fait fureur chez les marchands de déguisement pour enfants« .
Apaisement et cauchemar se nichent dans l’oeil de celui qui regarde, écoute et imagine, et une patte d’ours se transforme parfois en tentacule visqueux. Le regard de Diego Vecchio, légèrement déviant et cruel, ouvre les portes d’un imaginaire revisité. Vous n’aurez plus envie de dormir.
Ours (Osos, 2010), Diego Vecchio traduit de l’espagnol (argentin) par Stéphanie Decante, L’Arbre vengeur (Forêt invisible), septembre 2013, 141 pages, 12€


8 Comments
Lystig
une belle couverture qui m’attire
et le reste aussi !
Sandrine Brugot Maillard
Oui, elle est très réussie, tu as raison de le souligner.
manU
J’adore la couverture et l’histoire me tente beaucoup !
Sandrine Brugot Maillard
L’ours en peluche ne cesse jamais d’être attirant, c’est justement de ça que parle ce roman, cette fascination, cette innocence véhiculées par ce doudou…
valeriane
Il a l’air sympa ce bouquin… je le note!
Sandrine Brugot Maillard
Tu fais bien : c’est toujours bon de lire argentin de temps en temps 🙂
Cornwall
Je l’ai fini hier soir, et la magie n’a absolument pas opérée, pour un récit de 144 pages je l’ai trouvé trop long et partant trop dans le rocambolesque.
Par contre la couverture est une réussite, avec le clin d’œil à Casimir, superbe ^^
Sandrine Brugot Maillard
Je crois en effet que ça marche à la magie ou pas, un peu comme pour les contes : il y a ceux auxquels on croit (ou auxquels on aimerait croire encore) et ceux qui nous semblent trop… long ou trop… rocambolesque ou autre… il y a aussi les trop cruels…