
Cette chère humanité – Philippe Curval
L’Europe du Marché commun s’est définitivement fermée au reste du monde en s’entourant de murs hauts de plusieurs kilomètres, réputés infranchissables. Belgacem Attia les franchit pourtant. Espion de la Ligue, il doit empêcher le Marcom de détruire toute la planète. En effet, la Compagnie a inventé le temps ralenti et peu à peu, le monde se détraque.
Philippe Curval met en scène un monde dépassé par sa technologie et des protagonistes qui cherchent à s’en protéger, en le fuyant. Qui dans les rêves, comme les oniromanciens et leurs adeptes ; qui dans le sexe et ses excès comme Sylvie la coprophage et Luis Llapasset, ministre de l’information, qui meurt de trop d’orgasme et de jeunesse ; qui dans un désir schizophrénique d’être Dieu, tel Simon Cessieu, président de la Compagnie du temps ralenti, qui rêve d’immobiliser le monde dans un éternel présent.
Cette Europe imaginée par Curval est à la fois délirante et très structurée. Les images les plus insolites, parfois dérangeantes, traversent les imaginaires de ces personnages ligotés dans une société castratrice. Dans ce monde protecteur, les enquêteurs, informateurs, commissaires et autres dénonciateurs se chargent de surveiller des habitants décérébrés par un pouvoir tenu secret : un cauchemar d’uniformisation où le Bien de tous est pensé d’en haut et la répression implacable. Cette chère humanité n’est pas une lecture facile mais reste d’une alarmante actualité malgré les années : inquiétant…
Philippe Curval sur Mes Imaginaires
Cette chère humanité, Philippe Curval, Robert Laffont (Ailleurs et Demain), 1976, 289 pages

